Les Cahiers de la Maison de l’Épargne – édition 33
Janvier / Mars 2025
ÉDITO
LÉPARGNE ET LES FRANCAIS
L’épargne est un sujet d’importance majeure, tant pour les ménages que pour l’économie nationale. Les Français sont traditionnellement connus pour leur propension à épargner (deuxième pays d’Europe derrière l’Allemagne), ce qui est souvent considéré comme une vertu économique. Plusieurs facteurs influencent cette tendance à l’épargne.
D’abord, la culture de l’épargne est bien ancrée en France, où la sécurité financière est souvent privilégiée. Les Français ont accès à une variété de produits d’épargne, tels que le Livret A, l’assurance-vie, le livret populaire, etc… qui offrent des options sécurisées et fiscalement avantageuses.
Ensuite, le contexte économique joue un rôle clé. En période d’incertitude économique (comme celle que nous traversons depuis plusieurs mois) ou de faible croissance, les ménages ont tendance à renforcer leur épargne par précaution. Les taux d’intérêt bas des dernières années ont poussé les épargnants à rechercher des placements plus rentables, bien qu’ils restent généralement prudents.
Enfin, les politiques publiques et les incitations fiscales peuvent aussi encourager ou décourager certaines formes d’épargne.
En conclusion, l’épargne est un pilier de la stabilité financière des ménages et un levier important pour l’investissement et la croissance économique. Cependant, elle doit être gérée de manière à équilibrer sécurité et rendement, tout en s’adaptant aux évolutions économiques et réglementaires.
Bonne année 2025 à toutes et tous nos épargnants ! La Maison de l’Epargne continuera à jouer son rôle pédagogique pour vous informer et aider à prendre les meilleures décisions pour l’avenir de votre épargne.
Ernesto ORIHUELA
Directeur
AUX LARMES, ÉPARGNANTS
1987 : Krach de Wall Street
Le 19 octobre 1987, sous la pression d’une remontée des taux d’intérêt, l’indice Dow Jones de la Bourse de New York perd 22,6 % de sa valeur, ce qui constitue la seconde plus importante baisse jamais enregistrée en un jour sur un marché d’actions.
Aussi appelé « lundi noir » (en référence au jeudi noir du krach boursier de 1929), l’origine est l’addition de plusieurs éléments : les fluctuations brutales du dollar au milieu des années 1980, l’introduction du système automatique d’achat et vente des actions, et surtout à cause du doublement de la dette depuis la fin des années 1970 (suite à l’augmentation des taux d’intérêts pour combattre l’inflation).
Les taux d’intérêts atteignent des sommets sans précédents au prix d’une sévère récession qui fait disparaitre l’inflation et un afflux des capitaux aux Etats Unis. Dans les Accords de Plaza, puis du Louvre (1985-1987), les pays du G7 s’entendent pour intervenir sur les marchés et organiser un repli du dollar. Mais l’économie américaine dopée par la baisse de sa devise de presque 50% est en plein boom et les tensions inflationnistes deviennent inévitables. A partir de 1987, les taux d’intérêt vont commencer à remonter jusqu’au mois d’octobre 1989 où les taux d’intérêt vont atteindre la barre de 11% (contre 6,5% en 1987).
Dans un premier temps, les marchés ont vu avec plaisir la hausse de ces taux (dans une vision d’économie en croissance). Néanmoins, à partir d’un certain niveau, les taux deviennent un frein à l’investissement et à la croissance économique. Le 19 octobre, le krach devient inévitable. Le lundi, à la réouverture de la bourse, l’annonce d’un déficit commercial important des États-Unis et le relèvement des taux directeurs de la banque centrale allemande, la Bundesbank, causent un mouvement de panique. En 2 jours, 600 millions d’actions auront été échangées (ce qui représente plus de 3 fois l’activité du mois). En comparaison, lors du krach du 29 octobre 1929, la valeur du Dow Jones avait chuté de -12,6%, alors que le 19 octobre 1987, le Dow Jones chute de -22,6%. Parmi ces effets, cette chute fait aussi tomber les indices boursiers en Australie (41,8%), au Royaume Unis (26,4%) et au Canada (22,5%) (parmi d’autres pays).
Les banques centrales, à l’inverse que 1929, ont assuré publiquement qu’elles effectueraient le refinancement d’urgence des banques qui en feraient la demande, et ainsi écarté le risque systémique qui menaçait l’ensemble des marchés financiers.
Les pertes sont estimées à plus de 1 000 milliards de dollars. Le 19 octobre 1987 montrera l’interdépendance entre les changes, taux d’intérêt et actions ; et comment un déséquilibre né de l’un peut se propager aux autres.
Et dans l’actualité, les problèmes sont aussi récurrents
Riad Salamé : Le Ponzi Libanais
Courrier International / Les Echos
A la tête de la Banque Centrale du Liban de 1993 à juillet 2023, Riad Salamé, âgé de 75 ans, a été arrêté le 3 septembre 2024. Suspecté de détournement de fonds publics et de blanchiment d’argent, il est soupçonné d’avoir accumulé un riche patrimoine immobilier et bancaire grâce à un montage financier et à des détournements de fonds publics.
Un rapport de la Banque mondiale affirme que depuis la fin de la guerre civile, les finances publiques ont servi « aux intérêts d’une économie politique bien établie, qui instrumentalise les institutions gouvernementales ». Le rapport indique que l’accumulation excessive de la dette a été utilisée pour donner une illusion de stabilité et renforcer la confiance dans l’économie afin que les dépôts des banques commerciales continuent d’affluer.
Pour les experts de la Banque mondiale qui ont rédigé le rapport, « une part importante de l’épargne de la population sous forme de dépôts dans les banques commerciales a été mal utilisée et mal dépensée» au cours des trente dernières années.
Les dépenses du gouvernement n’étaient pas destinées à des fins productives. Il ne s’agissait pas d’investir dans les infrastructures ou de renforcer le capital humain. Elles ont été utilisées pour des dépenses courantes.
Le « système de Ponzi» du Liban a également été provoqué par les déficits des comptes courants et le taux de change surévalué causé par la politique de la Banque centrale consistant à maintenir des taux fixes par rapport au dollar. La Banque centrale libanaise a augmenté ses emprunts pour tenter de protéger la monnaie et, en 2015, a renfloué le système bancaire, tout en insistant sur le fait que le système était sain, niant ainsi les rapports qui affirmaient le contraire.
Finalement, en octobre 2019, pendant que les banques du pays ont fermé deux semaines, des sorties de capitaux de la part de « gens influents du pays » ont été effectuées. Pendant ce temps, les épargnants ont perdu 92 % de leur épargne. Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban est accusé d’avoir mis en place une véritable pyramide de Ponzi à l’échelle du pays qui aurait contribué à enrichir les actionnaires des banques au détriment du public.
La nature humaine dans ses rapports à la richesse
Louis de Boulogne Le Vieux (1609-1674), | Danaé et la pluie d’or | Collection particulière
Mythe : Danaé est la fille d’Acrisios, roi d’Argos, et d’Eurydice. Son père ayant été averti par un oracle qu’il serait un jour tué par l’enfant de sa fille, enferme Danaé. Mais Zeus, épris de la jeune femme, se change en pluie d’or et traverse sous cette forme le toit de sa prison pour s’unir à elle.
Petites phrases des Grands Penseurs
« N’estime l’argent
ni plus
ni moins
qu’il ne vaut :
c’est un bon serviteur
et un mauvais maître »
Produits d’épargne d’actualité
Bilan de l’épargne
des ménages en France en 2024
Un document publié par la Fédération bancaire française en novembre dernier présente le comportement de l’épargne en France. Ci-dessous quelques extraits et chiffres clés.
1. L’épargne est toujours abondante en France. Après avoir atteint un pic au 2ème trimestre 2020 (26,1%), en raison des chutes de consommation pendant la période de confinement, le taux d’épargne des ménages s’est rapproché de son niveau d’avant Covid (15,2% au 4ème trimestre 2019) avant de se stabiliser autour de 18% (18,2% au 3ème trimestre 2024). A titre de comparaison, la France fait partie des pays de la zone euro où le taux d’épargne est l’un des plus élevés (Allemagne : 20% ; Espagne : 13,1% ; Italie : 12,9%).
2. S’agissant de l’épargne réglementée, la collecte sur les Livrets A et LDDS semble se normaliser. En novembre, elle a atteint 560 millions d’euros. Au total, l’encours sur les deux produits s’élève désormais à 627,2 milliards d’euros.
3. Après avoir connu une forte croissance depuis 2022, la collecte du LEP faiblit. Il a recueilli 340 millions d’euros en novembre, portant son encours à 78,1 Mds€. Selon la Banque de France, le nombre de LEP est passé de 9,5 millions en mars 2023 à près de 11,5 millions en mars 2024.
4. Face à des livrets redevenus moins attractifs, l’assurance vie a repris ses couleurs en attirant 2,9 milliards d’euros au mois d’octobre, un niveau jamais atteint depuis 15 ans à la même période.
Coup d’oeil sur les rendements de l’épargne
Rendements des livrets
Livret |
Taux |
Plafond |
Livret A, Livret Bleu | 3% | 22 950€ |
Livret d’Épargne Populaire | 4%* | 10000€ |
Livret Jeune** | 3-4% | 1 600€ |
Plan d’Épargne Logement*** | 2.25% | 61 200€ |
Livret de Développement Durable**** | 3% | 12 000€ |
Compte Épargne Logement***** | 2% | 15 300€ |
* Depuis le 1er Août 2024
*.* (Le taux d’intérêt annuel est librement fixé par les banques. Il ne peut pas être inférieur à 3 %. Les intérêts sont exonérés d’impôt sur le revenu jusqu’à la veille du 12ème anniversaire.
*.*.* A compter du 1er Janvier 2024.
*.*.*.* Les intérêts sont exonérés d’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux. Le taux est aligné à celui du livret A.
*.*.*.* * Les intérêts sont exonérés d’impôt sur le revenu, mais sont soumis aux prélèvements sociaux.
Rendements des assurances vie
Performance annuelle
|
Fonds en Euros
|
2020 | 1.30% |
2021 | 1.10% |
2022 | 1.91% |
2023 | 2.60% |
2024 (prévision) | 2.50% |
Rendements des SCPI
(Selon l’ASPIM)
Année |
Taux |
|
2020 | +4.18 | |
2021 | +4.49 | ↑ |
2022 | +4.53 | ↑ |
2023 | +4.52 | ↓ |
2024 | +4.52 |
Performance des valeurs immobilières côtées en bourse
Année |
Paris CAC40 |
2020 | -7.14% |
2021 | +23.97% |
2022 |
-5.70%
|
2023
|
+14% |
2024 (depuis le 01/01/24 au 30/12) | -2,51% |
Croissance PIB France
Année |
|
2020 | -7.5% |
2021 | +6.4% |
2022 | +2.5% |
2023 | +0.9% |
2024 | +1.1%* |
* INSEE
Inflation, variation sur un an (Insee/ Décembre 2024) …………………………………. 1,3%